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Voyages d'écriture en francophonie

MÉDIATION - Des collégiens du Havre et de Tunis participent à une expérience collective transculturelle

En écho avec le thème du prochain festival littéraire Le Goût des Autres, le projet Voyages en francophonie a donné lieu à un travail d’écriture animé par deux écrivains avec des classes de 3e du Havre et des classes de Tunis. Reportage au collège Marcel Pagnol.

Le Goût des Autres met au centre de sa programmation un projet à la fois insolite et créatif qui a pour ambition de réunir deux continents, deux villes, deux écrivains (l’un français et l’autre tunisien), des collégiens, pour donner voix à une francophonie en mouvement. Un voyage en francophonie entre Le Havre et Tunis. Ce dialogue d’écriture entre de jeunes adolescents sera valorisé lors d'un grand rendez-vous dans le cadre du festival Le Goût des Autres 2019, une lecture musicale par la comédienne Manon Thorel de textes issus des ateliers d’écritures (dimanche 20 janvier - 14 h 30 à L'Esperluette). L’ensemble des textes sera regroupé au sein d’un seul et même recueil tiré à 500 exemplaires dont la sortie est prévue le 9 mai 2019.
La typologie et le rythme des ateliers d’écriture menés par Yamen Manai au Havre et François Beaune en Tunisie sont parfaitement identiques. Yamen Manai travaille au Havre avec deux classes de collège et François Beaune avec deux classes de lycée à Tunis. Les deux écrivains ont proposé dans un premier temps aux élèves d’enregistrer avec leur téléphone portable une histoire vraie vécue par un proche, un ami, un membre de la famille… À raison de huit séances de deux heures d’ateliers avec l’écrivain en résidence dans l’établissement, chaque classe produira dix histoires, d’une page chacune. Bénéficiant de deux journées d’écriture personnelle et de correction des textes, les écrivains seront également responsables de la sélection et de la rédaction finale des écrits des élèves à publier.

« L’écriture peut changer le monde »

Pour l’heure, les 20 élèves de la classe de 3e du collège Marcel Pagnol travaillent par demi-groupe sur l’introduction de leurs textes… Ils ont déjà écrit un premier jet à partir d’une histoire inspirée de faits réels recueillie dans le cercle de leurs proches. Comment commencer ? Comment plonger le lecteur dans l’action ? Sous la conduite de l’écrivain qui multiplie les questions et saisit l’histoire naissante sur un ordinateur, la première phrase s’affiche en grand sur le mur de la classe : « Le téléphone sonne. C’était le week-end… Se saisissant de son portable, Kirian voit le nom de son patron s’afficher à l’écran »… Chacun cherche la suite… On échafaude des scénarios, rajoute des ingrédients… L’écrivain explique que l’auteur a le droit de choisir ses personnages et de construire son histoire comme il l’entend. L’histoire s’enrichit, s’écrit au fur et à mesure des discussions et des choix du groupe. On apprend à débusquer les répétitions, à utiliser le mode interrogatif, à chercher ce qui doit être mis en avant pour continuer l’histoire. « Il a fallu convaincre les élèves de l’intérêt de cette démarche… Mais une fois cette alliance initiale réalisée, c’est beau de les voir jouer le jeu et s’embarquer sans réserve dans le voyage imaginaire de l’écriture. Avec tous les questionnements qu’il suscite, ce travail constitue aussi une belle façon de dégager les valeurs communes qui peuvent nous réunir au-delà des différences », se réjouit Yamen Manai, écrivain tunisien, très heureux de participer à cette expérience collective transculturelle. Partie prenante du projet, la professeure de français du collège Marcel Pagnol et la documentaliste référente sont là pour soutenir les élèves entre les séances et leur rappeler leurs engagements. « C’est aussi l’occasion de redire l’importance de la langue française et d’inscrire cette action dans le cadre plus large de la francophonie qui concerne plus de 300 millions de personnes de part et d’autres de la Méditerranée », souligne Yamen Manai. Après l’atelier, les enfants avoueront être fiers d’être devenus des auteurs, d’avoir fait travailler leur imagination… « L’écriture permet de mieux communiquer ensemble, de s’exprimer, de prendre possession » disent-ils. « L’écriture peut changer le monde », conclut même l’un d’entre eux. Leur professeur de français voit dans ces moments d’échanges « un apprentissage à l’écoute de l’autre ».

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