Culture

Le Noël d’Auggie Wren, une autre histoire du temps

CRÉATION Festival littéraire Le Goût des Autres 2018

Il est facile de parler de "petits moments de grâce" lorsque l’on évoque les lectures musicales que l’on découvre durant Le Goût des Autres depuis quelques années. Ces mots prennent tout leur sens pour Le Noël d’Auggie Wren, l’une des créations de cette édition 2018 du festival : l’écriture de Paul Auster, la lecture de la comédienne Laëtitia Botella et l’interprétation d’Auggie par l’auteur Thomas Scotto, portés par la voix cristalline et le violon de la musicienne Pauline Denize.

L’histoire, c’est celle d’une rencontre – comme souvent pour les beaux récits. Celle que va faire un journaliste-écrivain à qui le New York Times commande, pour les fêtes de fin d’année, l’écriture d’une nouvelle... Nous sommes au cœur de Brooklyn – comme souvent avec Paul Auster. L’auteur pénètre dans l’échoppe d’un marchand de cigares. Un certain Auggie Wren. Commence alors une conversation pour le moins étrange. Au-delà des mots, c’est la photographie qui va rassembler les deux hommes. Sceptique dans un premier temps, le journaliste consulte, à la demande insistante du commerçant, les albums de dizaines et de dizaines de photographies réalisées par Auggie. Si sa première réaction est de ne rien y voir d’intéressant, le journaliste remarque de plus en plus de détails et de contrastes dans ces scènes de vies quotidiennes. Jusqu’à la révélation : le rythme. Auggie Wren photographie le temps, le calme d’un début de semaine, la rapidité d’un week-end. Découvrant une multitude de personnages en arrière-plan, il comprend que le photographe amateur immortalise le temps naturel et le temps des gens.

Entre rêve et réalité

C’en est fini de notre journaliste, le voilà "ferré", captivé par la personnalité atypique d’Auggie Wren. Faisant part de sa difficulté à produire le récit d’un conte de Noël, le marchand de cigares se propose alors de lui raconter lui-même une histoire. Celle d’un homme qui volait des livres, de la perte d’un portefeuille ne contenant que quatre photos. Celle d’une grand-mère aveugle qui accueillit un soir de réveillon un inconnu venu lui rendre le précieux portefeuille et fit semblant – peut-être – qu’il s’agissait de la visite de son petit-fils Robert. Celle de cet inconnu qui raconte et enjolive une vie qui n’est pas la sienne pour embellir le repas de Noël d’une femme âgée. Celle d’Auggie Wren qui découvrit chez la vieille dame des appareils-photos volés, qui en vola un à son tour et commença, avec ce geste inconsidéré, à immortaliser le temps… Douce histoire ou véritable fiction ?

A cet instant, le conte pour le New York Times se dessine, et les voix de Laëtitia Botella et de Thomas Scotto plongent les jeunes spectateurs dans une aventure aux multiples contours, portée par la musique de Pauline Denize, scintillante comme un soir de Noël… "just a Perfect Day".